Il Manifesto

La volonté qui tue

On travaille pour vivre, mais on meurt au travail. Cela arrive tous les jours, presque sans surprise, souvent sans soulever d’ indignations.
Combien de morts cette année ? 1200 ou 1400 ?

Trop souvent, les responsables s’en sortent avec une réprimande ou une petite amende et ils peuvent ainsi continuer à privilégier les profits au détriment de la santé des salariés.

Mais le 17 novembre deux évènements ont eu lieu.
Le premier, cyniquement, on peut l’appeler « normal » : dans une usine de caoutchouc de la banlieue de Bologne, deux travailleurs ont trouvé la mort et trois autres ont été blessés par l’explosion d’un mélange qu’ils étaient en train de préparer. Les victimes représentent le haut et le bas de l’organisation du travail : il s’agit du PDG et d’un ouvrier indien payé 1100 euros par mois.
Le deuxième évènement est, par contre, significatif– on pourrait dire extrêmement positif si le contexte qui est à son origine n’eut été une des plus graves hécatombes d’ouvriers vécues dans notre malheureux pays. Un juge de Turin a confirmé la requête du procureur M.Raffaele Guariniello, demandant le renvoi en jugement du PDG de la société Thyssen-Krupp pour « homicide volontaire », probablement avec DOL. Cela signifie que, pour la première fois, un tribunal italien va s’exprimer sur l’hypothèse que la responsabilité des morts au travail n’est pas seulement individuelle mais de l’entreprise et que le coupable a agi en connaissance de cause des risques imposés aux salariés dans le but de réduire les coûts de la sécurité des machines et des travailleurs.

Moins de coûts, plus de gains

Les responsables de la multinationale allemande savaient et ils étaient responsables de l’existence de trois niveaux de sécurité. Le niveau maximum (c’est-à-dire le minimum pour garantir la sécurité du travailleur) est obligatoire en Allemagne, un degré plus bas est appliqué dans l’usine de Terni et, en dernier, une protection moindre dans l’établissement de Turin, voué à une prochaine fermeture, où donc n’était plus possible dépenser de l’argent pour le renouvellement des extincteurs dans une usine déjà condamnée - et ses ouvriers avec. Il ne s’agit pas de la « distraction » des travailleurs, comme s’aventurent à répéter à longueur de journée nos entrepreneurs sans dignité ni pitié. On meurt à cause d’une décision réfléchie du patron et des ses émissaires, dans le but de garantir les profits. Certes, on ne pense pas à garantir la sécurité, si chère.
Le renvoi en jugement des présumés responsables de la mort de sept ouvriers ne va pas soulager la douleur des familles, des mères, femmes, enfants, fiancées des victimes. Ne va pas rendre le sourire à leurs compagnons. Seulement, ces sept ouvriers ne seront pas tués deux fois. Il y aura l’espoir de faire connaitre à tous la vérité. Un peu de justice n’est pas rien ces temps-ci, après le scandaleux procès des responsables de la répression des jeunes qui avaient manifesté à Gênes, au G8. Mais le soulagement s’arrête là, avec un gouvernement qui efface toutes les contraintes pour les entreprises, goudronnant la route qui mène les ouvriers au cimetière ou à l’hôpital.

Par Loris Campetti
Traduction : : Anna-Maria Merlo

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