Craignant de s'embourber dans une longue et coûteuse « guérilla judiciaire » avec les cols bleus, la Ville de Montréal s'adresse à la Cour supérieure pour traiter d'un seul coup la suspension de 1800 employés ayant participé à un débrayage illégal.

Le 8 décembre 2015, environ 2000 cols bleus ont participé à une assemblée spéciale de leur syndicat dans la foulée des moyens de pression sur le partage du coût des régimes de retraite municipaux. Or, la Ville de Montréal s'était adressée la veille à la Commission des relations du travail et avait obtenu une ordonnance déclarant la rencontre illégale.

Malgré l'ordonnance, les cols bleus s'étaient réunis, si bien que la Ville avait décidé d'imposer des sanctions à 1812 employés. Les quatre membres de l'exécutif syndical avaient reçu deux mois de suspension sans solde, tandis que 39 représentants syndicaux avaient écopé d'un mois et 1769 membres, d'une semaine.

Le Syndicat des cols bleus a toutefois contesté ces mesures disciplinaires en déposant pas moins de 1812 griefs. Pour éviter de s'embourber dans les procédures, la Ville de Montréal a tenté de réunir tous les dossiers, mais le 5 avril dernier, l'arbitre du travail Marcel Morin a refusé, estimant ne pas avoir la compétence de réunir autant de cas.

« Le Syndicat a entrepris de se livrer à une véritable guérilla judiciaire en refusant de réunir les griefs et en faisant valoir qu'il procédera à l'audition de ces griefs "à la pièce", un à la fois », dénonce la Ville de Montréal dans une requête déposée cette semaine à la Cour supérieure. La métropole espère ainsi voir le tribunal annuler la décision de l'arbitre et le forcer à entendre les causes en une fois, plutôt qu'une par une.

« Déraisonnable »

Montréal évalue qu'entendre les 1812 causes pourrait prendre plusieurs années. Pour chaque dossier, il faudrait présenter les mêmes bandes vidéo qui durent plusieurs heures. « Il serait injustifié, déraisonnable et contraire à l'intérêt public de requérir de la Ville qu'elle procède à une telle preuve près de 2000 fois », estime Montréal.

La métropole souligne qu'une telle façon de procéder coûterait extrêmement cher, en plus de ralentir le travail des arbitres du travail. « Il serait en effet totalement déraisonnable et abusif de contraindre la Ville à procéder individuellement dans chacun des 1812 griefs individuels déposés pour le compte des salariés col bleu visés, alors que ces dossiers requièrent une preuve identique de la part de la Ville et posent des questions de faits et de droit similaires, voire identiques. »