Envoyer Imprimer Société - Article paru
le 25 février 2010
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Une planète et des hommes

Biodiversité et agriculture  : reprise des négociations

Sœurs ennemies quand l’une envahie l’autre ou que l’autre intoxique l’une, biodiversité et agriculture peuvent aussi devenir de parfaites associées. L’Inra pousse des recherches en ce sens.

Se faire du mouron ne sera jamais une bonne affaire. L’herbe est si mauvaise que sa réputation a fini par la stigmatiser dans le langage courant. Comme le doryphore ou le puceron, le mouron est de cette nature encombrante, qui asphyxie les blés, ruine les rosiers et bouffe nos patates. Mauvaises graines que tout cela, contre lesquelles agriculteurs et jardiniers bataillent depuis des siècles, parfois à l’arme de destruction massive.

Biodiversité naturelle versus nature artificielle  ? Le conflit peut être rude. Mais l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) travaille à un accord de paix, voire de coopération. Bref état de l’avancée des négociations.

Avec, en préalable, une ou deux mises au point sur le conflit lui-même. Ni gentils ni méchants dans cette affaire. « L’agriculture, c’est de la biodiversité », rappelle Laurent Lapchin, directeur scientifique adjoint à l’environnement. Les sélections de variétés de blés – l’Inra en a collectionné 10 000 ces dernières décennies – de maïs ou de colza sont le fruit d’un patrimoine naturel.

Souvent Docteur Jekyll, les mauvaises herbes, elles, peuvent être Mister Hyde à leurs heures, note pour sa part Xavier Reboud, de l’unité de Dijon. « Le coquelicot ou la véronique en sont, rappelle-t-il. Or elles contribuent à nourrir les abeilles, pollinisatrices et garantes de la continuité du système. »

La guerre commence quand l’un phagocyte l’autre. « Un pied de coquelicot produit environ 100 000 graines capables de résister pendant près de quarante ans », poursuit Xavier Reboud. Un seul hectare de terre peut abriter jusqu’à 50 millions de semences de mauvaises herbes, susceptibles de provoquer des problèmes mécaniques au moment des labours, de réduire le rendement des récoltes ou de les « salir », entraînant une baisse de leur valeur marchande. Le puceron ne vaut guerre mieux – il en existe plus de 4 000 espèces, dont 600 en France –, lequel non seulement boulotte les cultures mais est, en sus, vecteur de virus.

Longtemps, herbicides et autres pesticides ont été l’unique arme mise à disposition des agriculteurs. D’autres, plus propres, sont aujourd’hui à l’étude, parmi lesquelles l’utilisation de la biodiversité elle-même. Les insectes, singulièrement, s’avèrent de parfaits auxiliaires. Certains carabes – genre de coléoptères – sont gourmands de mauvaises herbes. L’hyménoptère parasitoïde, sorte de micro-guêpe inoffensive pour l’homme, apprécie quant à elle de pondre ses œufs dans le corps des pucerons. « À l’instar d’un alien, la larve grandit à l’intérieur du corps et finit par le tuer », explique Jean-Christophe Simon, de l’unité de Rennes. « Dans des conditions optimums, le taux de mortalité atteint 50 %. »

Coccinelles, syrphes ou chrysopes  : l’agriculture trouve ainsi en la biodiversité naturelle une alliée qu’elle n’a pas forcément intérêt à détruire. Mais en optimiser l’apport n’est pas simple. Scientifiquement, il reste à comprendre comment tous ces écosystèmes fonctionnent au regard des particularités locales et variétales. Qui mange quoi, sous quelles conditions et au prix de quels aménagements  ? « Cela peut poser des problèmes d’organisation sociale, quand les intérêts à moyen ou long terme peuvent s’opposer », souligne Laurent Lapchin. Où il convient de trouver, entre autres, un équilibre entre rendement économique et limitation des intrants. Tous le notent, le 0 % pesticide n’est pas encore pour demain. Mais des progrès sont à relever  : en dix ans, l’agriculture française a réduit de 35 % son utilisation de produits chimiques.

Marie-Noëlle Bertrand

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