Eglise Saint-Gimer

rue Barbacane - 11000 Carcassonne

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Eglise Saint-Gimer

Eugène Viollet-le-Duc découvre Carcassonne, jeune homme, lors d'une excursion aux Pyrénées, en 1831. Après son voyage d'Italie, il y repasse sans doute en 1839. En 1843, il est chargé de faire un rapport sur les travaux de restauration de Saint-Nazaire, puis, l'année suivante, est chargé seul de la direction de ces travaux. Dès lors, les rapports entre Carcassonne et Viollet-le-Duc ne cesseront plus, jusqu'à sa mort en 1879. Comme architecte " attaché à la commission des Monuments Historiques " il est nommé en outre architecte diocésain de l'Aude : il accomplira ainsi la réhabilitation de la cathédrale Saint-Michel, et construira la petite église Saint-Gimer, à la demande de Mgr de la Bouillerie

Des quatre chantiers carcassonnais de Viollet-le-Duc, Saint-Gimer est le moins connu. On identifie trop souvent Viollet comme un restaurateur, alors qu'il voulait passionnément une architecture pour son temps, qu'il n'eût pas souvent l'occasion de construire. Il n'a réalisé dans toute sa carrière que trois églises neuves : Saint-Denis de l'Estrée, à Saint-Denis, Aillant-sur-Tholon et Saint-Gimer de Carcassonne.

Eglise Saint-Gimer

L'église a été construite de 1854 à 1859 ; la modestie était l'un de ses objectifs affichés, puisque le travail de Viollet-le-Duc se voulait la véritable architecture, avec un budget limité. Il y eut quelques conflits durant ce chantier, car en l'absence de Viollet-le-Duc le maire, ou le curé venaient donner des ordres sur le chantier, ce que l'architecte ne pouvait admettre. Il y eut aussi des inquiétudes sur le coût : le devis initial était de 100 000 F et l'évêque souhaitait se limiter à 90 000 F ; finalement la construction coûta au total : 93.441,28 F.

Saint-Gimer est une église qui comprend une nef et deux bas-côtés, un chevet polygonal cantonné de deux sacristies, le tout précédé d'un porche. Pour cette église, dont le programme est celui d'une simple paroisse, Viollet-le-Duc a privilégié la simplicité, tout en faisant appel à un répertoire de formes qu'on pourrait qualifier de " gothiques ", puisant à la fois dans l'univers du nord et celui du midi, mais n'hésitant pas au besoin à créer aussi des formes nouvelles. Du nord vient la partition du volume en trois vaisseaux inégaux en hauteur et largeur, les colonnettes engagées aux retombées des voûtes, avec leurs chapiteaux à crochets. Du midi vient l'écriture austère et compacte des volumes extérieurs, les percements limités, l'idée d'éclairer la nef centrale par une série d'oculus (trait qui se retrouve, d'une autre façon, à Saint-Michel).

Les piliers séparant la nef des bas-côtés avec leurs curieux fûts carrés aux angles abattus, sont une invention de l'architecte qui démontre ici sa volonté de créer de nouvelles formes architecturales, dans l'économie même du style du XIII° siècle qu'il mettait volontiers en avant. Dans toute cette construction, Viollet-le-Duc utilise d'ailleurs un style sévère, graphique, extrêmement épuré : on sent bien que le gothique utilisé ne l'est pas pour donner un sens lyrique, ou même historiciste, à la construction, mais n'est là qu'un code pour mettre en forme un espace moderne qui se veut avant tout adapté aux besoins. Il écrira d'ailleurs " il s'agit pour moi de tout autre chose que de faire un monument parfait sous le rapport de l'architecture. Il s'agit de faire une église convenable et simple. "

Anatole de Baudot conclut, à propos des trois églises bâties par Viollet-le-Duc " ces œuvres ne sont pas gothiques dans le sens que l'on attache généralement à ce mot, mais au contraire parfaitement de notre temps et possèdent un charme tout particulier parce qu'elles sont raisonnées ". Saint-Gimer est donc, dans sa modestie, un témoignage des prémices de l'architecture moderne que Viollet-le-Duc a passionnément appelé de ses vœux tout au long de sa carrière et de sa vie.

L'église Saint-Gimer a été classée, au même titre que la Cité de Carcassonne, au répertoire des sites protégés comme patrimoine mondial de l'UNESCO.

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